Les systèmes de systèmes : avions, drones et opérateurs ne font qu’un

L’annonce phare de la journée d’ouverture du Salon du Bourget fut la présentation d’une première maquette du NGF (New Generation Fighter), un avion militaire développé par Airbus et Dassault selon les spécifications définies par les gouvernements français et allemand en avril 2018.

Si son design novateur a fait la une de plusieurs magazines techniques et grand public, le NGF n’est que la partie émergée de l’iceberg.

L’iceberg, c’est le FCAS (Future Combat Air System), un très dense réseau d’avions, de systèmes sans pilote et d’opérateurs tous interconnectés : un système de systèmes (SoS).

La maquette du chasseur nouvelle génération et le remote carrier (crédit: Dassault Aviation et Air&Cosmos)

Bien que la définition d’un système soit largement acceptée dans la littérature comme étant un ensemble de composants organisés pour accomplir une fonction ou un ensemble de fonctions spécifiques (IEEE), l’analyse des systèmes de systèmes est encore un domaine en constante évolution.

Une définition exhaustive (Checkland, 1999) indique qu’un SoS est un ensemble de deux ou plusieurs systèmes qui sont définis séparément mais qui fonctionnent ensemble pour atteindre un objectif commun. Deux propriétés des SoS ont également été identifiées par Maier en 1998 :

  • L’indépendance opérationnelle des composants : Si le système de systèmes est démonté, les systèmes qui le composent doivent pouvoir fonctionner de façon autonome.
  • L’indépendance de gestion des éléments : Les systèmes (…) maintiennent une existence opérationnelle continue indépendante du système des systèmes. (Maier, 1998).

L’un des SoS les plus connus en aéronautique militaire est le système ISTAR(renseignement, surveillance, acquisition d’objectifs et reconnaissance). Il a pour objectif la collecte et le partage des informations pour créer la meilleure représentation possible du scénario de mission et améliorer le processus décisionnel.

Plusieurs systèmes composent une architecture ISTAR : avions avec pilote, drones, satellites, centres de télécommunications terrestres et dispositifs embarqués par le soldat. Ces systèmes sont indépendants sur le plan opérationnel car ils peuvent remplir leur rôle en dehors d’une architecture ISTAR. Par exemple, un aéronef peut se guider, voler et détruire une cible seul. Ils bénéficient également d’une indépendance de commandement, ce dernier n’étant pas centralisé. Un pilote à bord de l’avion et un soldat au sol pensent d’eux-mêmes et n’ont pas de contrôle direct l’un sur l’autre.

L’architecture ISTAR est un SoS dont le but est de recueillir et de partager l’information.

Un exemple de système n’étant pas un SoS en aéronautique est l’avion : les systèmes qui le composent (propulsion, électronique, etc.) ne peuvent pas remplir leur rôle séparément et ils répondent à un décideur, le pilote.

Comme nous l’avons déjà mentionné, le FCAS est un système de systèmes composé à la fois de véhicules habités et de véhicules sans pilote, dont l’objectif est de pénétrer dans un espace aérien fortement défendu (Airbus, 2019).

Les principaux systèmes qui le composent sont :

  • le NGF, habité, qui agit comme une plate-forme de gestion avec des capacités de pénétration élevées.
  • Des remote carriers, contrôlés par le NGF et faisant office de capteurs et de systèmes d’armes.
  • D’autres avions et satellites alliés, avec lesquels l’interopérabilité doit être assurée par un système de gestion des télécommunications et des données, le Air Combat Cloud.

Cette architecture a déjà fait l’objet de plusieurs tests par Airbus en 2018 : l’interconnectivité en vol entre véhicules habités et drones et la technologie LTE Air Node, qui est à la base de la construction du réseau de communications militaires sécurisé.

Airbus FCAS architecture (Airbus 2019)

La même logique peut être appliquée à un autre drone présenté au Salon du Bourget, Skyeyetech par Azur Drones. Ce dernier est destiné à la surveillance de sites industriels tels que les centrales nucléaires, les plates-formes pétrolières et les ports. Pour remplir sa fonction, le drone doit être intégré dans un système de sécurité déjà en place, composé de gardes, de moyens de détection automatique (caméras et capteurs) et de moyens dissuasifs (alarmes, portails, etc.).

Skeyetech deployment (Crédit : Azur Drones 2019)

Sur la base des exemples mentionnés ci-dessus, on peut mettre en évidence quelques observations générales sur les avantages et les questions à aborder dans le développement et le fonctionnement des SoS.

L’interopérabilité

L’interopérabilité est la capacité des systèmes à travailler ensemble pour atteindre les capacités opérationnelles requises dans une architecture SoS (Kok Wah et al. 2008). Cette caractéristique est difficile à obtenir car les systèmes sont souvent développés par différentes entreprises, sans avoir une vision précise de leur utilisation finale dans une architecture SoS. Ainsi, les spécifications ne proviennent pas de principes communs, le système doit être adapté plus tard dans son développement pour faire partie d’un SoS.

L’intégration avec et sans pilote

Dans une grande partie des SoS, les systèmes avec et sans pilote avec différents niveaux d’autonomie coexistent : l’autorité d’un système sur l’autre doit être soigneusement établie. Dans la gestion du trafic aérien, par exemple, les contrôleurs aériens sont responsables de l’espacement entre les aéronefs, mais dès qu’un conflit est détecté par le TCAS (Traffic Collision Avoidance System), le pilote doit suivre l’ordre du TCAS même s’il est contraire à celui du contrôleur aérien. Dans ce cas, les capteurs du système embarqué sont censés être plus précis que le suivi radar, mais que se passerait-il si l’homme avait raison ?

Cybersécurité

Par nature, un SoS a une intelligence décentralisée étendue, qui est plus difficile à défendre contre les intrusions externes qu’un système centralisé. De plus, dans l’aéronautique, les systèmes sont optimisés dans la gestion du poids et de l’énergie : dans le cas d’un petit drone, l’ajout d’une carte électronique dégraderait fortement ses performances et son endurance en ajoutant du poids et en augmentant sa consommation de batterie, ce qui permettrait aux pirates d’utiliser ce manque comme point d’accès au réseau.

IAC Partners peut initier le développement de solutions SoS via deux leviers principaux :

  • Challenger les spécifications pour répondre à des exigences SoS complexes : les systèmes composant un SoS doivent être développés en tenant compte d’une liste de spécifications complexe, responsable de l’interopérabilité et de la valeur ajoutée de chaque système. Analyser, challenger et compléter les spécifications est la clé du succès d’un programme SoS.
  • Renforcer la collaboration entre tous les acteurs du projet : grâce à notre expertise multi industrie et à notre implantation internationale, IAC Partners peut améliorer la coopération des différentes entreprises et organismes travaillant sur un projet SoS. Grâce à la mise en œuvre de méthodologies et de workshops, la complexité du programme SoS est encadrée et chaque défi est traité et maîtrisé

Des résultats tangibles à chaque mission