Point de vue : nucléaire, deux visions qui s’affrontent et se complètent

Dans le domaine des énergies, tout semble opposer la France et l’Allemagne au sujet du nucléaire.

L’un mène des grands projets (EPR, programme Grand Carénage, restructuration de la filière, etc.) tandis que l’autre souhaite sortir totalement de l’énergie nucléaire, d’ici à fin 2023, pour la remplacer par les énergies renouvelables et en dernier ressort, par les fossiles. Leurs visions sont opposées, pour autant, pas leurs objectifs affichés : produire plus, de façon plus sûre et plus propre, tout en effaçant leur dépendance aux énergies fossiles.

Revenons à l’équation de départ : sortir des énergies fossiles polluantes et non durables. Si pour la production d’électricité et la mobilité terrestre les alternatives existent, pour le maritime, l’aérien et la chimie des matières premières le remplacement des énergies fossiles reste à trouver. La croissance des pays émergents, rajoute un défi de taille à cette équation.

Bientôt brûler du pétrole ou du charbon pour produire de l’électricité deviendra un crime !

Les solutions existent mais doivent progresser !

Les énergies alternatives majeures sont aujourd’hui le nucléaire, les renouvelables (éolienne, hydrolienne, solaire et géothermique) et dans une moindre mesure, la biomasse.

Malheureusement, les énergies renouvelables ne sont pas encore assez performantes, pâtissent de nombreuses contraintes naturelles et, surtout, hydrolien à part, ne sont pas encore compétitives selon la plupart des comparatifs connus, voir ci-dessous pour la France.

Le nucléaire est aujourd’hui la seule technologie alternative capable de produire de l’énergie électrique à grande, voire très grande échelle, de façon modulable, sans être tributaire de contraintes géo climatiques, avec un compte économique viable et une occupation de surface à taille industrielle ; à savoir que une tranche nucléaire délivre entre 800 et 1200 MW de puissance ce qui équivaut à environ 240 éoliennes de taille moyenne ou 120 de taille maximale, sachant que une distance de fonctionnement importante est requise entre deux turbines. Les contreparties du nucléaire sont le niveau de risques, la gestion des déchets et du démantèlement des installations, les niveaux d’investissement requis et le manque de popularité.

Nucléaire et énergies renouvelables : et si leur synergie était la clé ?

Il y a de quoi occuper dans les années à venir les ingénieurs des deux pays : les Français vont rendre le nucléaire plus sûr et les Allemands les énergies renouvelables plus performantes. Et ensemble ils livreront peut-être la solution la plus pragmatique pour la transition énergétique.

Ce qui permettra d’alimenter notre demande d’énergie croissante, semble être la savante combinaison de nucléaire et de renouvelable alimentant des réseaux électriques encore plus smart, capables de jongler entre la variabilité des besoins de notre civilisation moderne et celle des disponibilités des trois éléments naturels. Le nucléaire fournira une production de masse et servira de variable d’ajustement, les énergies renouvelables permettront de réduire progressivement le besoin en énergie nucléaire, sous condition de rentabilité.

Un dernier point important à mentionner est le progrès en cours pour régler l’un des plus gros handicaps de l’énergie électrique : son stockage. Batteries ou systèmes à hydrogène atteignent encore aujourd’hui des rendements encore faibles (lire notre publication : « Les vertus révolutionnaires de l’hydrogène« ), de l’ordre du 50%, et pour des applications très localisées. Des solutions efficaces permettront de mieux exploiter les énergies renouvelables et d’optimiser le quota nucléaire à produire, là aussi, qu’il s’agisse de réseaux électriques ou de locomotion terrestre, il y’a de belles marges de progrès à trouver pour des ingénieurs visionnaires.

Une saine compétition et collaboration entre nucléaire et renouvelable permettra de faire la peau aux fossiles.

Les deux locomotives européennes de la transition énergétique sont, vis-à-vis du nucléaire, comme celles d’un TGV : orientés en directions opposées, l’une avance, l’autre recule pour en définitive faire avancer le train de la transition énergétique plus rapidement !

Article rédigé par Loris Mazza, Partner et expert Nucléaire pour Maintenance & Entreprise.

Découvrez l’interview de Loris Mazza sur les enjeux de la fillière nucléaire !

Des résultats tangibles à chaque mission